Depuis plusieurs années, le projet de contournement routier Martigues – Port-de-Bouc soulève l’opposition de la fédération FNE13 et de nombreux défenseurs de l’environnement.
Ce dossier, récemment soumis à l’enquête publique, cristallise aujourd’hui les enjeux majeurs de protection de la biodiversité, de gestion du foncier naturel et de lutte contre l’artificialisation des sols dans un contexte méditerranéen déjà soumis à d’intenses pressions.
Le projet s’étend sur 8,3 km, comprenant :
- 6,9 km de tracé neuf en 2×2 voies,
- 0,3 km de raccordement à l’autoroute A55,
- 1,1 km de section existante sur l’A55 incluant l’échangeur de Martigues Nord.

Des justifications publiques contestées
Présenté par l’État et les collectivités comme une nécessité d’intérêt public majeur pour désengorger la RN568 et sécuriser la desserte industrielle de Fos-sur-Mer, le projet s’appuie selon FNE13 sur des arguments « fallacieux ». En réalité, la liaison routière existe déjà via la RN568, limitée à 90 km/h et infligeant des réductions mineures — permises gérables par du réaménagement ponctuel. Le volume de trafic, stable et compatible avec la capacité actuelle, se traduit surtout par l’absence de réelle volonté des acteurs publics pour promouvoir des alternatives à l’automobile.
Les solutions alternatives, telles que le renforcement de la voie ferrée déjà sous-utilisée, la création de liaisons cadencées entre les pôles urbains ou la généralisation du fret ferroviaire métropolitain (attendu dès 2026), sont absentes du dossier ou traitées de manière superficielle. FNE13 considère que toute nouvelle infrastructure routière encouragera, par effet d’appel d’air, la circulation automobile et l’étalement urbain, au détriment de la transition vers des mobilités plus sobres et partagées.
Un projet incompatible avec la protection de la biodiversité
Ce projet s’étale sur 84 hectares d’espaces naturels, agricoles et forestiers, en contradiction totale avec les objectifs de réduction de l’artificialisation des sols. Parmi les secteurs touchés figurent des milieux à très fort enjeu écologique : pelouses méditerranéennes, prairies humides, steppes salées, habitats de nombreuses espèces protégées, dont plusieurs amphibiens, reptiles, chiroptères, et plus d’une centaine d’espèces dépendantes des milieux ouverts et humides.
La demande de dérogation pour destruction d’espèces protégées comprend 105 espèces, et la compensation écologique proposée est jugée inadaptée, notamment pour les espèces végétales rares comme Ononis mitissima ou Ononis pubescens , dont la survie régionale serait menacée. Sans surprise, le Conseil National de la Protection de la Nature a rendu un avis défavorable en février 2025, reprochant au porteur de projet l’ancienneté des études et l’absence d’analyse sérieuse des alternatives de moindre impact.
Le projet sous-estime nettement ses impacts (espèces omises lors des inventaires, impacts indirects et impacts cumulés non intégrés au dimensionnement de la compensation, etc) et la séquence ERC présente d’importantes lacunes. La réserve naturelle régionale de Pourra, située à 900m du projet est fortement impactée et doit être renforcée dans le cadre d’une mesure d’accompagnement dédiée.
Conseil National de Protection de la Nature • CNPN
Impacts aggravés sur les milieux humides, l’air et le climat
Les zones humides concernées jouent un rôle clé de tampon hydrologique et d’accueil de la biodiversité. Leur fragmentation par le tracé aggraverait la vulnérabilité de ces milieux face au changement climatique. Le projet comprend par ailleurs des risques accumulés de bruit, de pollution atmosphérique et d’émissions de gaz à effet de serre, sans bénéfices directs assurés pour les rivières de la RN568 actuelle.
Enquête publique prolongée jusqu’au 13 novembre
Face aux nombreuses interrogations des riverains sur ce projet de contournement, l’enquête publique est prolongée jusqu’au 13 novembre. Mur anti-bruit, tracé exact, ou encore la crainte de voir le nombre de voitures augmenter à deux pas de chez eux : les interrogations restent encore très nombreuses.
Enfin, FNE13 rappelle le caractère paradoxal de ce projet dans un territoire où les discours sur la transition écologique (décarbonation portuaire, rapport modal) s’accompagnent de l’artificialisation massive pour l’industrie et le transport routier — alors que d’autres territoires européens et français, à l’image du port de Dunkerque, investissent massivement dans les mobilités alternatives et les infrastructures cyclables. Le vrai progrès passera par la rénovation des infrastructures existantes, l’investissement dans les alternatives ferroviaires et douces, et une réflexion commune sur l’avenir de notre territoire face au défi climatique.
Consultez l’avis complet de FNE13
Contact : Stéphane Coppey • 07.66.85.03.62
Photo de couverture • Dossier de demande d’autorisation environnementale – Dreal Paca