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THT : la tierce expertise juge pertinente la solution du Collectif THT 13/30

La réunion publique organisée le 2 juin à Arles a mis en lumière la pertinence des solutions enterrées et sous-marines pour répondre aux enjeux de la transition énergétique, tout en protégeant les paysages et les activités locales.

Face au projet de ligne à très haute tension aérienne, les échanges ont permis de démontrer que l’enfouissement des câbles le long des digues du Rhône, associé à la relance d’une liaison sous-marine en Méditerranée, constitue une alternative à la fois technique et crédible. Cette approche offre une voie de compromis, permettant d’acheminer l’énergie nécessaire tout en préservant la richesse environnementale et agricole des territoires traversés, et répond ainsi aux attentes de nombreux citoyens et acteurs locaux.

Un projet aérien toujours contesté

Le projet de ligne à très haute tension porté par RTE prévoit l’installation de près de 180 pylônes, certains atteignant jusqu’à 80 mètres de hauteur, sur un tracé de 65 kilomètres traversant des territoires emblématiques : la Terre d’Argence, la Camargue et la plaine de la Crau. Destinée à approvisionner le pôle industriel de Fos-sur-Mer, cette infrastructure vise à accompagner la décarbonation de l’industrie locale, mais se heurte à une opposition unanime sur le terrain.

« Personne ne peut accepter le projet tel qu’il est présenté aujourd’hui », a déclaré Patrick de Carolis, maire d’Arles et président de la Communauté d’Agglomération Arles Crau Camargue Montagnette, lors de cette réunion devant plus de 800 personnes. « La Camargue, c’est le pays du souffle, prenons garde à ce que ce ne soit pas le pays de la colère », a-t-il ajouté.

Crédit photo © Jean-Luc Moya • 2 degrés

L’alternative du collectif THT 13-30 : enfouissement et ligne sous-marine

Face à l’hostilité suscitée par le projet aérien, le collectif THT 13-30 défend une solution technique plus respectueuse de l’environnement et des territoires.

Leur proposition s’articule autour de deux axes majeurs :

  • L’enfouissement des câbles électriques le long des digues du Rhône, entre Jonquières et Fos-sur-Mer, permettant ainsi d’éviter la traversée des terres agricoles et de limiter l’impact paysager (tracé violet sur la carte).
  • La relance d’un projet sous-marin, initialement envisagé par RTE puis mis de côté : la ligne « Midi-Provence » en Méditerranée, qui permettrait d’acheminer l’énergie en toute discrétion et avec un impact minimal sur les milieux naturels (tracé violet sur la carte).

Jean-Laurent Lucchesi (Vigueirat Nature, membre de FNE13) a détaillé cette alternative lors d’une présentation récente. Ses arguments s’appuient sur une analyse précise des besoins énergétiques de la zone industrielle portuaire (ZIP) de Fos. Selon le collectif, le renforcement du réseau RTE déjà en cours permettrait d’atteindre une puissance de 1,2 GW d’ici 2028. L’enfouissement de la ligne Jonquières-Fos porterait cette capacité à 3,2 GW à l’horizon 2032. Enfin, la combinaison d’une production d’hydrogène, de la relance de la ligne sous-marine Midi-Provence et de la récupération de l’énergie des éoliennes offshore ouvrirait la voie à une capacité totale de 8,2 à 9 GW d’ici 2035.

Crédit photo © Jean-Luc Moya • 2 degrés

Nous avons le choix entre une simple ligne électrique et un véritable projet de territoire

À l’issue de la présentation de la tierce expertise par M. Marc Petit, ingénieur à CentraleSupélec, Jean-Luc Moya (Agir pour la Crau, membre de FNE13) a exposé les principaux enseignements de cette analyse :

  • La solution portée par le Collectif THT 13/30 est jugée pertinente sur le plan technique.
  • L’étude souligne la possibilité d’un décalage dans le calendrier de certains volets du projet, notamment concernant la production d’hydrogène.
  • La capacité du réseau est envisagée de façon évolutive, avec des étapes clés entre 2026 et 2030, puis 2028 et 2035.
  • Le projet Midi-Provence est réactualisé, et l’étude cite en parallèle le projet GILA (Gironde Loire Atlantique), une ligne sous-marine reliant Bordeaux à Nantes, dont la mise en service est prévue en 2033.

Toutefois, l’étude pointe certaines limites :

  • Elle adopte une vision « techniciste », qui ne prend pas suffisamment en compte les impacts d’une ligne aérienne sur la biodiversité, les terres agricoles, les économies locales et les paysages.
  • La question de l’acceptabilité sociale du projet, notamment dans les territoires du Gard, de la Camargue et de la Crau, n’est pas intégrée dans l’analyse.

Finalement, la comparaison entre la solution de RTE et celle du Collectif THT13/30 met en avant la pertinence de l’alternative portée par ce dernier : : une approche globale, évolutive et respectueuse des enjeux environnementaux et sociétaux, à l’image des grands projets d’infrastructures énergétiques alternatives qui émergent en France.

Au niveau des impacts sur l’avifaune, notamment, soulignons l’intervention de François Cavallo de l’association NACICCA, membre de FNE13, qui, à travers les différents comptages réalisés en 2024 et 2025 montre l’extrême richesse de nos territoires :

  • 38.500 oiseaux observés
  • 78 espèces différentes dont 70% protégées

Rien n’a été décidé selon M. Le Préfet

À l’issue de ces longs et parfois vifs échanges, le préfet de région, Georges-François Leclerc, a tenu à rappeler qu’« aucune décision n’est actée pour le moment ». Le dossier reste donc ouvert, et le débat public se poursuit.

Face à l’hypothèse d’une poursuite du projet selon le tracé aérien, le Collectif THT13/30 prévient : « Nous engagerons des recours en cascade si nécessaire. » Clément Lajoux, porte-parole des agriculteurs, a même martelé : « Cette ligne ne verra jamais le jour, on ira jusqu’à la guerre ! »

Alors que la transition énergétique ne peut s’accomplir au détriment des territoires et de leurs habitants, la solution combinant enfouissement et liaison sous-marine émerge comme un compromis réaliste et respectueux de l’environnement1. Reste à savoir si RTE et l’État sauront entendre cette voix médiane, afin d’éviter l’envenimement d’un conflit déjà très tendu.