Le 4 juillet, le tribunal correctionnel de Marseille a jugé un promoteur et le bureau d’études Ecotonia pour destruction d’habitat d’espèce protégée.
Derrière une friche en apparence anodine du 13e arrondissement, une chouette chevêche a réveillé l’opinion publique. FNE Bouches-du-Rhône a été l’une des premières à se constituer partie civile, aux côtés de la LPO, l’ASPAS et d’autres collectifs locaux, dont Le Poumon vert de Saint-Mitre “.
C’est la première fois qu’un bureau d’études environnementales est poursuivi pour complicité dans ce genre de dossier
Stéphane Coppey, Administrateur FNE13, délégué au juridique
Quand l’étude sert le projet plus que la nature
e cabinet Ecotonia, fondé par Gérard Filippi, est accusé d’avoir produit une expertise lacunaire sur la présence de la chouette chevêche d’Athéna, espèce pourtant recensée à plusieurs reprises sur le site de Château-Gombert. Malgré des alertes envoyées dès 2021 par les associations et relayées par les services de l’État, l’étude commandée par le promoteur conclut à l’absence de nidification. Ce feu vert conditionnel a permis de lancer les bulldozers en septembre 2023. Résultat : la destruction irréversible d’un habitat crucial.
“Nous avons relevé de nombreuses incohérences dans cette étude : calendrier d’observation inadéquat, absence de preuves solides, et surtout, aucun conseil clair de demander une dérogation pour destruction d’espèces protégées”, précise Isabelle Vergnoux, avocate de FNE13 et FNE Paca. Le tribunal rendra son verdict en septembre, mais le signal envoyé est déjà fort.
Une bataille plus large contre les “bureaux d’études de complaisance”
Pour FNE13, le combat dépasse la chouette. “Dès qu’Ecotonia est impliqué dans un dossier, nous ouvrons l’œil. Ils ont une fâcheuse tendance à sous-estimer les impacts écologiques”, confie Richard Hardouin, président de FNE13. Le cabinet, très actif dans le sud de la France, a notamment signé des études pour des projets controversés : un hôtel de luxe à Cassis, un lotissement à Fuveau, ou encore un écoquartier à Rognac.
À Fuveau, c’est encore grâce à la ténacité des associations et FNE13, qu’un projet de 132 villas de luxe a été stoppé net. En janvier, le tribunal administratif de Marseille a suspendu les travaux, pointant l’absence de dérogation environnementale. Une constante dans les projets suivis par Ecotonia, dont les méthodologies sont vivement critiquées par des experts indépendants. “On parle parfois de copier-coller, d’analyses biaisées, voire de complaisance systématique”, peut-on lire dans le journal Marsactu.
L’équilibre entre béton et biodiversité
Ce procès relance la question de l’indépendance des études environnementales. “Le système est perverti dès le départ : ce sont les promoteurs qui commandent et financent les études. Il y a un conflit d’intérêts structurel”, déplore FNE13. Pour notre fédération, l’objectif n’est pas de bloquer tout développement, mais de défendre un urbanisme respectueux des équilibres écologiques.
Alors que Marseille et ses alentours font l’objet d’une pression foncière accrue, FNE13 appelle à une refonte du système : désigner des experts indépendants, renforcer les contrôles, garantir des études transparentes et opposables. “Aujourd’hui, ce sont les citoyens, les riverains et quelques associations comme la nôtre qui jouent le rôle de garde-fous”, conclut Richard Hardouin.
En septembre, le jugement du tribunal dira si ce rôle doit aussi s’inscrire dans le marbre judiciaire.
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